Des parisiens en mal de transport
A la fin du 19ème siècle, Paris doit faire face à une circulation de plus en plus intense dans un contexte de forte croissance économique. Tandis que Londres a un métro dès 1863, New York en 1868 et Chicago en 1892, Paris n’a toujours pas de système de transport public adapté, les omnibus à chevaux et les tramways étant très insuffisant.
Dans l’urgence de l’Exposition Universelle
Le retard de Paris est dû un conflit entre la Compagnie des Chemins de Fer que soutient l’État et qui souhaite réaliser un réseau desservant la banlieue (selon le principe du RER actuel) et la Ville de Paris qui veut mettre en place son propre réseau « intramuros ». L’imminence de l’Exposition universelle de 1900 et ses millions de visiteurs précipite l’adoption de la deuxième solution, et après des hésitations, le choix se porte sur un système souterrain plutôt qu’aérien.

Paris éventré
Le chantier démarre en 1898 ; les 2000 ouvriers mobilisés travaillent à ciel ouvert ; les tunnels sont creusés peu profondément afin de réduire les couts et suivent le tracé des rues. La première ligne, reliant la Porte de Vincennes à la Porte Maillot (actuelle ligne 1) et desservant les sites de l’Exposition Universelle, est achevée en vingt mois dans l’urgence et inaugurée en 1900. Cinq autres lignes seront créées dans les années suivantes, au cours desquelles les rues éventrées font de Paris un vaste chantier.

Crainte du voyage sans retour
Le métro fait peur, il est qualifié d’enfer souterrain. Les parisiens craignent de s’engouffrer dans ses souterrains ; ils imaginent les risques d’effondrement, mais aussi de pneumonies causées par les suintements d’eau dans les tunnels, et d’électrocution lié au mode de traction, sans oublier les odeurs épouvantables. Ils ont encore en mémoire certains drames ferroviaires.

Du végétal pour rassurer
Hector Guimard est l’auteur des premières stations de métro. En maitre de l’Art Nouveau, il bannit toute forme architecturale du passé et s’inspire exclusivement de la Nature. Dans les premières stations, baptisées « libellules » la fonte prend des formes de tiges et de feuilles, et la verrière évoque une aile de libellule géante. Un parti pris stylistique destiné à rassurer les parisiens qu’une entrée trop solennelle ou austère aurait pu décourager. Guimard a réalisé des variantes, en remplaçant l’auvent par deux tiges de muguet géantes (exemple, station Monceau) encadrant une plaque de lave émaillée sur laquelle est inscrit le nom de la station. Uniques au monde, ces stations sont devenues un emblème de la capitale.

La plus grande catastrophe du métro
Le 1er aout 1903, un an après l’ouverture de la ligne 2 (Dauphine-Nation) le métro connait un premier drame, avec un incendie à la station Couronnes, près de Belleville. En fin d’après-midi, au moment de la plus grande affluence, les voyageurs amassés sur les quais sont pris au piège dans un nuage de fumée. Paniqués, ils se ruent vers un cul-de-sac. Le spectacle est affreux lorsque les pompiers, après de longues minutes de lutte, parviennent enfin jusqu’à eux. Quatre-vingt-quatre personnes sont mortes, et la température dans la station était montée à 80 degrés. Une enquête est menée et les plaques « sortie » sont dès lors éclairées.